Le moteur thermique à combustion interne d’essence peut également utiliser un carburant à base d’éthanol. Plus précisément, il s’agit en France d’un mélange de 15 % d’essence E et 85 % d’éthanol, d’où son appellation E85.
Bon à savoir : depuis le 12 octobre 2018, de nouveaux noms de carburants sont affichés dans les stations-service (directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014). L'éthanol est représenté par un cercle dans lequel est insérée la lettre « E » suivie du chiffre 85.
Le carburant E85 : qu'est-ce que c'est ?
Un véhicule à moteur bicarburant ou Flexfuel est capable de fonctionner avec :
- les essences habituelles (SP95 et 98 – ou E5) ;
- leurs évolutions actuelles faiblement additionnées d’éthanol ;
- le E85.
Le E85 consomme en réalité un mélange d’essence avec un taux d’éthanol variable jusqu’à 85 %. Ainsi, grâce à des matériaux résistant à cet alcool agressif et une gestion électronique de la richesse bouclée par une sonde Lambda, ces moteurs méritent donc pleinement leur qualificatif de « flexibles » au niveau des carburants !
Sur un certificat d’immatriculation, un véhicule homologué Flexfuel comporte la mention FE dans le champ P3. On emploie aussi parfois l'appellation VCM pour « véhicule à carburant modulable ».
Bien connu au Brésil, où l’éthanol est produit grâce aux immenses plantations de canne à sucre depuis plus de 30 ans, il est utilisé pur ou presque (E96) sur les véhicules à essence Flexfuel renforcés pour résister à la corrosion et à la baisse de la lubrification. En France, cet alcool issu de la betterave à sucre est apparu bien plus récemment comme carburant, en janvier 2007. Improprement connu sous le nom flatteur de bioéthanol, étant issu de végétaux, il serait plus juste de parler d'agroéthanol, étant donnés les intrants chimiques et la méthode de production industrielle polluante utilisée.
Vous l’aviez peut-être déjà deviné ? L’éthanol carburant E est bien l’alcool éthylique issu du sucre contenu dans les boissons alcoolisées.
E85 : principe du fonctionnement moteur
Sur la base d’un bloc à combustion interne 4 temps, il est possible de concevoir un moteur monocarburant, donc fortement optimisé et légèrement plus puissant qu’en version essence (5 %).
Dans le 1er cas, on va exploiter au mieux les caractéristiques de l’éthanol, notamment son taux d’octane, équivalent RON (Research Octane Number), d’environ 105, qui dépasse celui du SP98 (E5). Pour cela, les motoristes vont pouvoir augmenter le rapport volumétrique au plus grand bénéfice du rendement moteur. Même opération pour l’avance à l’allumage et le débit des injecteurs ! On évite ainsi la surconsommation de E85, souvent constatée sur les moteurs mixtes ou Flexfuel.
Quant à ces derniers modèles, qui sont de loin les plus nombreux, le système d’injection adapte la richesse du mélange en fonction des informations de la sonde Lambda logée dans l’échappement. Grâce à cette correction permanente de la richesse, le moteur fonctionnera correctement, quel que soit le pourcentage d’éthanol dans son réservoir unique.
Bien sûr, le calculateur possède des cartographies spéciales pour arriver à gérer de telles variations de carburant. Les durites, joints et autres matériaux (même métalliques) dont les pistons, en contact avec l’éthanol corrosif, sont adaptés pour parvenir à une fiabilité normale. En l’absence des modifications moteur devenues impossibles avec la rétrocompatibilité SP95 (E5), la surconsommation atteint 25 % en moyenne.
Il existe une autre possibilité : le montage d’un kit E85 ou Flexfuel sur un moteur à essence existant. Son principe est simple :
- un boîtier additionnel monté en série sur le faisceau électrique des injecteurs intercepte leur signal de commande ;
- selon les besoins du moteur, plein d’E85 et température du liquide refroidissement notamment, le boîtier génère ensuite un nouveau signal pour rétablir la richesse stœchiométrique ;
- celle-ci est souvent contrôlée par la sonde Lambda d’origine qui peut informer ce boîtier de commande dans sa version la plus élaborée.
Important : pour faciliter les démarrages et la progression à froid, les moteurs Flexfuel français sont alimentés sans le savoir en E65 en hiver soit 65 % d’éthanol et 35 % d’essence.
Critères économiques de l’E85
Malgré la surconsommation des VCM évoquée plus haut, rouler à l’E85 peut s’avérer (très) rentable comparé à l’essence et son prix moyen au litre d’environ 0,83 € demeure stable. Ce coût reste toutefois assez variable selon les enseignes des stations.
Convertir son véhicule au E85
En l’absence d’offre suffisante de véhicules neufs en France, on pourra se tourner vers les rares occasions ou la conversion. Celle-ci concerne essentiellement les autos produites après le millésime 2000, voire 1994, pour une fourchette de prix allant de 50 à 700 € pour un 12 cylindres. En pratique, il faut compter moins de 300 € (hors pose) pour un kit sérieux d’origine allemande. Dès lors, vu le faible investissement initial de conversion et sous réserve d’une compatibilité à 100 % de votre automobile, malgré l’agressivité chimique de l’éthanol, c’est une opération économiquement valable !
Jusqu'à récemment, un flou législatif existait autour de ces systèmes techniquement corrects. La DREAL (ex-services des Mines) n’avait pas vraiment de procédure de réception et le constructeur ne délivrait jamais l’attestation de conformité préalable. Les risques et périls de l'utilisateur étaient donc autant de points à vérifier avec son assurance. Afin de promouvoir les véhicules dits flexfuel tout en garantissant une efficacité minimale et une installation sécurisée sur les véhicules, un arrêté du 30 novembre 2017 (modifié par un arrêté du 19 février 2021) prévoit des dispositions techniques et administratives pour homologuer ces dispositifs et réglementer leurs installations sur les véhicules.
À savoir : les moteurs à carburateurs sont aussi convertibles et certains véhicules, comme la fameuse Toyota Prius semblent accepter sans modifications spéciales le passage à l’E85. À vérifier dans le temps...
E85 : achat d’une voiture Flexfuel
Pour les raisons abordées dans l’historique, les constructeurs ne proposent presque plus de voitures Flexfuel en France depuis début 2013 et l’arrivée de la norme Euro 5. La plupart de ces mêmes marques les fabriquent cependant toujours au Brésil, en Suède et aux USA.
À suivre ! Volkswagen commercialise depuis septembre 2015 en France sa Golf Multifuel E85 1,4 TSI Euro 6 déjà présente sur les marchés nordiques à partir de 22 450 €.
Bien sûr, il reste toujours la possibilité d’importer un véhicule neuf homologué en Europe. Préférez passer par mandataire ; il vous évitera les mauvaises surprises et autres tracasseries administratives, à un tarif aussi concurrentiel.
En France, actuellement, il vous faudra donc éplucher les annonces de voitures d’occasion pour y dénicher les rares modèles Flexfuel issus d’un maigre parc roulant d’environ 35 000 unités. Souvent affichées sous la cote argus officielle, elles vous feront profiter de bien meilleures affaires qu’avec la version monocarburant à essence.
Où acheter sa voiture Lire l'articleE85 : revente d’une voiture Flexfuel
Malgré donc moins de 600 stations délivrant du E85 aujourd'hui, un véhicule à carburant modulable reste viable puisqu’il peut rouler à l’essence par définition. Pour optimiser vos économies, une application iPhone ou Android vous permettra de retrouver ces précieuses pompes E85. Et pour tous les autres, il y a le site officiel du Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique.
Le VCM bénéficie aussi des bonus réservés aux véhicules écologiques, comme la carte grise gratuite selon les régions et l’autorisation de circuler lors de pics de pollution ; un avantage qui sera d’ailleurs sans doute étendu aux modèles avec kit, tous ces VCM étant considérés comme « peu polluants par construction ».
L'économie à l’utilisation et la rareté du produit, malgré une réduction de l’autonomie de 20 à 35 % due à la surconsommation correspondante, seront donc globalement favorables à la revente, surtout depuis le retour en grâce de ce type de carburant.
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L'E85 est économiquement intéressant, mais quel est son impact sur la conduite ? Est-il plus propre ? Gagne-t-on en performances ?
Quels agréments de conduite avec du E85 ?
Pour les raisons techniques déjà exposées, les performances demeurent égales ou souvent inférieures au mode essence, selon la qualité de la conversion. Bien sûr, les meilleurs résultats ont été obtenus par certains constructeurs sur leurs modèles Flexfuel d’origine.
En hiver, à froid et par temps très humide, les pétroliers doivent réduire le pourcentage d’éthanol du E85 pour éviter un ralenti instable, des calages et autres ratés constatés essentiellement sur les véhicules non modifiés ou avec certains kits sommaires.
Grâce à son fonctionnement possible sur deux carburants, l’autonomie n’est pas un souci et sera, au maximum, celle du mode essence. À partir de là, tous les trajets sont envisageables, même si la surconsommation d’E85 atteint son pic de 35 % en ville. Logiquement, on privilégiera la route et l’autoroute pour réaliser des économies maximales.
E85 et aspects environnementaux
Selon une étude de l’ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) datant de 2009, et quelle que soit la plante utilisée (blé, maïs, betterave ou canne à sucre), la réduction globale de CO² serait de + de 60 % en moyenne.
D’autres avis d’ingénieurs et de scientifiques critiques tempèrent toutefois cet enthousiasme, qui ne tient en réalité pas compte des impacts de l’agriculture intensive utilisée pour ces cultures.
Les perspectives sont toutefois positives. Ces bilans devraient s’améliorer avec les agrocarburants de seconde génération où toute la plante sera utilisable ; la France restant en tête de la production d’E85 en Europe. Ainsi, Mark Jacobson, un spécialiste de chimie de l’Université de Stanford, a déclaré selon son étude que « si certains polluants cancérigènes (benzène, butadiène) baissent, d’autres augmentent (formaldéhyde et acétaldéhyde) par rapport à l’essence ». Au final, les précurseurs de l’ozone sont toujours plus nombreux et même le sacro-saint bilan CO² est contredit par de nombreux organismes compétents, de l’INRAE (institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, issu au 1er janvier 2020 de la fusion de l'INRA et de l'IRSTEA) jusqu’à la Commission européenne.
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